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ni canons ni affûts; les breches d'Ath ne sont pas encore réparées; tous les remparts sous lesquels on avoit essayé mal-à-propos de creuser des souterrains, en soutenant la terre par des étaies, sont enfoncés, et on ne songe pas même qu'il soit question de les relever. Les soldats sont tout nuds, et mendient sans cesse ; ils n'ont qu'une poignée de ces gueux ; la cavalerie entiere n'a pas un seul cheval. M. l'électeur voit toutes ces choses; il s'en console avec ses maîtresses, il passé les jours à la chasse, il joue de la flûte, il acheté des tableaux, îl s'endette, il ruine son pays, et ne fait aucun bien à celui où il est transplanté; il ne paroît pas même songer aux ennemis qui peuvent le surprendre.

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J'oubliois de vous dire qu'il me demanda d'abord et dans la suite encore plus de nouvelles de M. le duc de Berri que des autres princes. Je lui dis beaucoup de bien de celui-là; mais je réservai les plus grandes louanges pour M. le duc de Bourgogne, en ajoutant qu'il avoit beaucoup de ressemblance avec madame la dauphine. Dieu veuille que la France ne soit point tentée de se prévaloir de la honteuse et incroyable misére de l'Espagne !ain)

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avec sa majesté. Pour moi je prie Dieu tous les jours afin qu'il bénisse votre voyage. Vos intentions sont droites; vous voulez le bien de vos églises et de votre maison, qui est si nécessaire au soutien de la catholicité. Son altesse électorale de Baviere n'a point d'autre intérêt que le vôtre, ni vous d'autre que le sien j'espère que vous ne serez ensemble qu'un cœur et qu'une ame dans la décision que vous allez faire. Rien ne peut jamais surpasser le profond respect et le zele avec lequel vous sera dévoué le reste de sa vie,

MONSEIGNEUR,

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AUTRE LETTRE

A M. L'ÉLECTEUR DE COLOGNE.

MONSEIGNEUR,

reçu

C'est avec la plus vive reconnoissance que j'ai la derniere lettre que votre altesse électorale m'a fait l'honneur de m'écrire. Que puis-je faire pour mériter tant de bontés? sinon vous obéir en vous parlant avec toute la liberté et toute la simplicité que vous exigez de moi..

Le pape agit en vicaire de Jésus-Christ, qui porte dans son cœur la sollicitude pastorale de toutes les églises. Il voit les maux que plusieurs vastes dioceses souffrent ; des troupeaux innombrables y sont errants et y périssent tous les jours, faute de vrai pasteur; les petits demandent du pain et il n'y a personne pour le leur rompre. Si chacun de ces grands dioceses qui auroient sans doute besoin d'être partagés en plusieurs avoit au moins un bon évêque, cet évêque dépenseroit peu à son église et travailleroit beaucoup pour elle; il porteroit le poids et la chaleur du jour; il défricheroit le champ du Seigneur de ses propres mains, à la sueur de son visage; il arracheroit les ronces et les épines qui étouffent le

grain; il déracineroit les scandales et les abus; il disciplineroit le clergé ; il instruiroit les peuples par sa parole et par ses exemples; il se feroit tout à tous, pour les gagner tous à Jésus-Christ. Vous occupez vous seul, monseigneur, la place de plusieurs excellents évêques sans l'être. Faut-il s'étonner qu'un grand pape qui est fort éclairé gémisse pour ces grands troupeaux presque abandonnés !

Mais, d'un autre côté, rien n'est si terrible que de devenir évêque, sans entrer dans toutes les vertus épiscopales; alors le caractere deviendroit comme un sceau de réprobation. Vous avez la conscience trop délicate pour ne craindre pas ce malheur. Plus les dioceses que vous devez conduire sont grands et remplis de besoins extrêmes, plus il faut un courage apostolique pour y pouvoir travailler avec fruit. Si vous voulez enfin être évêque, monseigneur, au nom de Dieu, gardez-vous bien de l'être à demi; il faut être l'homme de Dieu et le dispensateur des mysteres de Jésus-Christ; il faut qu'on trouve toujours sur vos levres la science du salut; il faut que chacun n'ait qu'à vous voir pour savoir comment il faut faire pour servir Dieu; il faut que vous soyez une loi vivante qui porte la religion dans tous les cœurs; il faut mourir sans cesse à vous-même, pour porter les autres à entrer dans cette pratique de mort qui

est le fond du christianisme; il faut être doux et humble de cœur, ferme sans hauteur et condescendant sans mollesse, pauvre et vil à vos propres yeux au milieu de la grandeur inséparable de votre naissance; il ne faut donner à cette grandeur que ce que vous ne pourrez pas lui refuser; il faut être patient, appliqué, égal, plein de défiance de vos propres lumieres, prêt à leur préférer celles d'autrui quand elles seront meilleures, en garde contre la flatterie qui empoisonne les grands, amateur des conseils sinceres, attentif à chercher le vrai mérite et à le prévenir; enfin il faut porter la croix dans les contradictions et aller au ministere comme au martyre: Sed nihil horum vereor, nec facio animam meam pretiosiorem quàm me. Pour entrer ainsi dans l'épiscopat, il faut que ce soit un grand amour de JésusChrist qui vous présse : il faut que Jésus-Christ vous dise comme à saint Pierre, M'aimez-vous? Il faut que vous lui répondiez, non des levres, mais de cœur: Eh! ne le savez-vous pas, Seigneur, que je vous aime? Alors vous mériterez qu'il vous dise : Paissez mes brebis. Oh! qu'il faut d'amour pour ne se décourager jamais et pour souffrir toutes les croix de cet état! Il est commode aux pasteurs qui ne connoissent le troupeau que pour en prendre la laine et le lait; mais il est terrible à ceux qui se doivent

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