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C'est exactement l'effet produit par ces trois mesures de deux syllabes chacune.

Au contraire, les mesures qui comportent un grand nombre de syllabes produisent un effet de rapidité :

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nous avons ici une mesure à 5 syllabes et sa vitesse correspond

à celle de l'idée. Il en va de même pour :

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où la première mesure comporte également 5 syllabes. Aux vers 13 et 14 l'impression de rapidité est obtenue par deux procédés successifs :

a) passage du tétramètre (v. 13) aux octosyllabes à deux

1. M. Souriau, L'évolution du vers français au XVIIe sierle écrit (La Fontaine, p. 214) : « Un de ses rythmes préférés est l'alexandrin quaternaire coupé de trois en trois syllabes :

3-3-3-3.

La Fontaine a tiré une fois du mélange de ce rythme et de l'alexandrin de Malherbe un effet très heureux trois vers coupés seulement à l'hémistiche décrivent la fatigue d'un mɛlheureux, dont la marche devient de plus en plus saccadée au quatrième vers coupé en 4 parties ».

Nous sommes d'accord sur ce qui concerne les coupes; mais nous voyons 6 mesures au vers 3. Il n'y a pas là de contradiction. M. Souriau dit en effet, et très justement (op. cit., p. 219) : « Il faut de plus éviter de tomber dans l'erreur qui consisterait à croire qu'une syllabe accentuée dans un mot de valeur détermine toujours une césure ».

mesures (v. 14 et 15), b) le dernier comportant une mesure

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HARMONIE.

Nous ne signalerons qu'un seul vers au point

de vue de l'harmonie, le quatrième : il est composé de 4 triades vocaliques qui se correspondent très harmonieusement

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CONCLUSION. Tous les moyens d'expression que nous venons d'étudier ne sont artistiques que parce qu'ils ne sont point exagérés l'auditeur ne les remarque pas nettement à première vue, mais il est indiscutable que leur résultante produit l'impression signalée 2.

La Mort et le Bûcheron est donc un poème en vers libres : a) au point de vue du rythme, puisque les alexandrins ne sont pas exclusivement tétramétriques; b) au point de vue de la rime, puisque celle-ci est tantôt plate, tantôt croisée,

1. « Rien n'égale au contraire l'admirable variété des coupes que La Fontaine a eu le talent d'introduire dans ce vers si court (l'octosyllabe) et partant réfractaire, pour un observateur superficiel, aux combinaisons harmonieuses » (Souriau, op. cit., p. 220).

2. Il va de soi que nous ne prétendons aucunement que tous ces effets soient conscients chez le poète. Ils existent, c'est tout ce que nous pouvons affirmer.

tantôt embrassée; c) au point de vue enfin du syllabisme, puisque les vers sont d'inégale longueur.

Les conclusions sur l'art de La Fontaine qui sont partout exprimées sont confirmées par ce que vient de nous apprendre l'analyse métrique de La Mort et le Bûcheron.

CHAPITRE VII

TRADUCTIONS

Nous soumettons deux traductions au lecteur : la première est terminée, la seconde n'est que préparée. Il ne faut voir là que des exercices d'école

fort instructifs d'ailleurs. Les quelques lignes de Lord Wodehouse que nous citons plus bas jugent avec une rigueur justifiée les imprudents qui essaient de traduire de la poésie lyrique en prose. Mais il est bon parfois de nous atteler à des tâches impossibles ne fut-ce que pour reconnaître la limite de nos forces.

ESSAI DE TRADUCTION EN ANGLAIS

TEXTE

1 Qu'un monstre tel que vous inspire peu de craintes !
Et que, s'il a quelque poison

5

Une âme aurait peu de raison
De hasarder la moindre plainte
Contre une favorable atteinte

Dont tout le cœur craindrait la guérison !
A peine je vous vois, que mes frayeurs cessées
Laissent évanouir l'image du trépas,

Et que je sens couler dans mes veines glacées
10 Un je ne sais quel feu que je ne connais pas.
J'ai senti de l'estime et de la complaisance,
De l'amitié, de la reconnaissance;

De la compassion les chagrins innocents

M'en ont fait sentir la puissance;

15 Mais je n'ai point encor senti ce que je sens.
Je ne sais ce que c'est ; mais je sais qu'il me charme,
Que je n'en conçois point d'alarme.

20

25

Plus j'ai les yeux sur vous, plus je m'en sens charmer.
Tout ce que j'ai senti n'agissait point de même,
Et je dirais que je vous aime,

Seigneur, si je ne savais ce que c'est que d'aimer.
Ne les détournez point, ces yeux qui m'empoisonnent,
Ces yeux tendres, ces yeux perçants, mais amoureux,
Qui semblent partager le trouble qu'ils me donnent.
Hélas! plus ils sont dangereux,

Plus je me plais à m'attacher sur eux.
Par quel ordre du ciel que je ne puis comprendre
Vous dis-je plus que je ne dois,

Moi de qui la pudeur devrait du moins attendre
30 Que vous m'expliquassiez le trouble où je vous vois ?
Vous soupirez, Seigneur, ainsi que je soupire;
Vos sens, comme les miens, paraissent interdits.
C'est à moi de m'en taire, à vous de me le dire;
Et cependant, c'est moi qui vous le dis.

34

CORNEILLE.

(Psyché) Acte III., Sc. 3., v. 1044-1077.

«To attempt a translation of a lyric poem into prose is the most absurd of all undertakings, for those very characters of the original which are essential to it, and which constitute its highest beauties if transferred to a prose rendering become unpardonable blemishes. >>

LORD WODEHOUSE.

Essay on the Principles of Translation.

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